Volume 1

Physiologie végétale, ou exposition des forces et des fonctions vitales des végétaux / Par M. Aug.-Pyr. de Candolle.

  • Candolle, Augustin Pyramus de, 1778-1841.
Date:
1832
    que les champignons de l’entrée et du fond fussent de la même espèce. La quantité de carbone que les cryptogames admettent dans leur tissu, est extrêmement diverse d une espèce a l’autre, et leur observation comparée prouve évidem- ment que leur accroissement est d’autant pins prompt qu’elles ont besoin de moins de carbone, comme M. de Humboldt l’avait déjà établi (1) : ainsi les agaricus querci- nus, bolctus igniarius , percnnis, etc. ; telephora me sente- riformis, sphœria hypoxyton , hydnum auriscatpium et autres espèces à végétation lente, donnent beaucoup de carbone, tandis que les byssus, les moisissures, les agarics et les hydnes à chair molle, etc., donnent peu de charbon et croissent fort vite. Certains champignons présentent encore un phéno- mène qui leur est particulier , celui d’exhaler du gaz hydrogène. M. de Humboldt a vu le premier, que de jeunes pieds cTagaricus campestris exhalent nuit et jour de ce gaz, et a revu ce fait dans quelques autres espèces. Je l’ai retrouvé dans deux champignons remarquables Lun et l’autre par leur couleur d’un noir très-intense, la sphœria digitata dont le gaz contenait 0,70 d’hydro- gène et le peziza nigra, qui en a exhalé 0,14- On avait craint que ce gaz ne fût dû à la décomposition du cham- pignon; et déjà ce fait, que le sphœria digitata qui est si éminemment coriace, en développe plus que le peziza nigra qui est si gélatineux , tendait à affaiblir ce soup- çon. M. Fr. Marcet a repris ces expériences sous ce rap -
    port (1) ; il a exposé des champignons sous l’eau, soit au soleil, soit à l’ombre : les premiers ont fourni en quel ques heures du gaz composé comme suit : Hjdrog. Azote. En heures.. Sphœrin 1 il gît ai a........ . 65 53 10 Agaric us cri cens 55 44 10 — del'ujuescens.... 7° 5o 8 *— physalüides . . . . 57 43 2 — le u cocep ha lus .. 42 56 6 A l’obscurité iis n’ont fourni que très-peu de gaz , le- quel contenait moins d’hydrogène : quelques-uns trans- portés au soleil en ont donné de nouveau comme à l’ordi- naire; ce qui prouve, d’un côté, qu’ils étaient sains, et de l’autre , que la lumière a ici une action directe qui rappelle celle que lui fait dégager le gaz oxigène des vé- gétaux verts. On peut donc conclure de ces faits que ce dégagement d’hydrogène est réellement vital et non dé- terminé par l’altération du champignon. Une partie des végétaux cellulaires est remarquable par la quantité de matière terreuse déposée dans leur tissu. Ainsi , les lichens contiennent une dose considé- rable de carbonate , et surtout d’oxalate de chaux. Les chara sont aussi très-remarqualdes par la croûte de car- bonate de chaux qui se forme à leur surface , et qui les encroûte comme d’une sorte d’enduit susceptible de faire effervescence avec les acides minéraux , comme MM. Lyell et Constant Prévost l’ont observé. M. Brews- ter a aussi trouvé de petits cristaux réguliers dans les (1) Ann. de Cliim. , 4o , p. 520.
    cellules sous cette enveloppe calcaire; le noyau qui reste après qu’on l’a enlevé paraît de nature siliceuse(i); les mousses paraissent , connue les monocotylédones , contenir des matières siliceuses; au moins on peut le con- jecturer d après leur inaltérabilité. L’accroissement des végétaux cellulaires est certai- nement fort différent des vasculaires, mais n’est encore connu que d une manière très-imparfaite. Il est évi- dent qu’il ne peut s’opérer que par la multiplication des cellules; mais ce développement du tissu cellulaire n’est connu ni dans les parties des vasculaires qui en sont composées, ni dans les plantes cellulaires. Quel- ques-uns, tels que M. Turpin, ont pensé que chaque cellule forme dans son intérieur des rudimens nouveaux de cel- lules qui grandissent et finissent par rompre la cellule mère , de manière que la multiplication des cellules végé- tales ressemblerait assez h 1 évolution du volvox; mais M. Morren qui a récemment étudié ce sujet (2) , n’a jamais rencontré les restes de ce tissu ainsi déchiré, et je crois que tous les observateurs en peuvent dire autant, même ceux qui admettent cette rupture en théorie. M. Morren croit avoir observé la véritable formation des nouvelles cellules dans une espèce de palmella identique ou analogue avec le P. cilpicola. Dans ce végétal, les cel- lules sont isolées et globuleuses ; chacune d’elles est en- tourée par une couche mucilagineuse; quand elles ont atteint une certaine grandeur, la couche mucilagineuse augmente, et l’on peut y reconnaître des espèces d’an- (1) Bull. sc. nat. , XI, p. 23i. (2) Bydrag. tôt de naturk., etc. ; Linnœa , vol. 5, î83o*
    neaux (Tantant plus distincts , qu’ils sont plus éloignés de la membrane de la cellule; plus tard, cette membrane elle-même prend l’apparence d’un mucilage, et les glo- bules qui étaient contenus et cachés dans ce mucilage commencent à s’accroître; le mucilage disparaît, et les jeunes cellules qui remplacent l’ancienne présentent les mêmes caractères qu’elle. Ce mode d’accroissement et de multiplication de cellules pourrait très-bien s’adapter à la plupart, et peut-être h tous les végétaux, et s’accorde bien avec le transport des sucs nourriciers par les méats intercellulaires et la perméabilité du tissu même des cellules, surtout dans leur jeunesse. Je suis loin , au reste, d’avoir une opinion arrêtée sur un sujet aussi obscur, et qui réclame de nouvelles observations faites avec sagacité et sans prévention. Je me borne h ce petit nombre de considérations sur la nutrition des végétaux cellulaires, soit pour ne pas répéter des détails qui font partie de 1 Organographie , soit parce que l’étude des cryptogames a été jusqu’ici peu avancée sous ce point de vue; et je dois avouer aussi que je l’ai peut-être moi-même trop négligée depuis quelques années, pour être bien au courant des travaux les plus modernes.
    * H '